La ville dans laquelle nous débarquons s’appelle Riobamba, mais ses habitants ont fini par la surnommer Friobamba, avec « frio » comme froid. S’ils avaient pu caser le mot « pluie », ils l’auraient fait aussi. Non, vraiment, il ne faut pas venir ici en espérant passer de douces soirées en terrasse. Ce n’est d’ailleurs pas du tout la raison de notre visite. Nous sommes ici pour fouler le grand, le géant, le titanesque volcan Chimborazo, qui culmine à 6263m, le plus haut d’Équateur.
Frio… euh… Riobamba
Laissons pour le moment le mastodonte de côté, il ne s’envolera pas. En arrivant le soir, la ville de Riobamba nous surprend, non par le charme pluvieux de ses rues, mais par son animation. Autant Latacunga, notre ville précédente, était déserte, autant celle-ci grouille de jeunes qui sortent, rient, chantent, titubent un peu, s’amusent beaucoup.
Nous sommes également étonnés du succès d’une spécialité bien française : la crêpe. Nous comptons pas moins de quatre crêperies dans notre quartier et, pour avoir testé, le résultat est gustativement honorable.
Le lendemain, nous flânons à la découverte du centre de Riobamba. Un certain guide de voyage (qui commence par Lonely et finit par Planet) nous apprend l’histoire de cette ville, ravagée par un tremblement de terre et reconstruite quatorze kilomètres plus loin.
Quelques pâtés de maisons colorées plus loin, nous montons sur la petite colline du Parque 21 de Abril. Nous sommes censés apercevoir le Chimborazo et les autres volcans du coin… nous n’avons vue que sur des bataillons de nuages prêts à nous pleuvoir dessus.
Le samedi est jour de marché à Riobamba. Il n’y a rien de mieux pour prendre le pouls des traditions d’une ville. Nous nous lançons dans le tour des trois principaux mercados. D’abord, le Mercado Santa Rosa avec ses montagnes de fruits et sa rue de la patate.
Le deuxième marché est celui de la Concepción, spécialisé dans l’artisanat et… le raccommodage. Une rangée entière de repriseurs attendent vos vêtements derrière leurs vieilles machines à coudre.
Enfin, à midi, le troisième marché de la Merced tombe à pic pour combler une petite fringale. Nous passons notre tour devant ses stands de cochons grillés (entiers) et trouvons notre bonheur végétarien sous la forme d’une purée de patate dorée à la plancha, puis recouverte d’un œuf sur le plat. Ce n’est peut-être pas flagrant, dit comme ça, mais c’est follement bon !
Randonnée sur le volcan Chimborazo
« Papa Chimborazo », c’est ainsi que les Quechuas surnommaient le volcan Chimborazo. Son âme sœur, Maman Tungurahua, se situe quarante kilomètres plus à l’est. Toute une mythologie entoure les volcans équatoriens, détaillant leurs amours, colères, rivalités, mais le Chimborazo reste le plus vénérable de tous. Les locaux nous expliquent d’ailleurs très sérieusement qu’il mérite un profond respect et qu’il faut se montrer particulièrement humble sur ses flancs, sous peine d’ennuis.
Trois ans plus tôt, nous étions passés par une agence qui propose la descente du Chimborazo à vélo, l’un de nos meilleurs souvenirs de voyage. Pour changer, nous entreprenons d’y grimper à pied, sans guide, et figurez-vous que cette randonnée rejoint également notre top liste !
Cela commence pourtant mal. Lorsque le bus nous dépose à l’entrée de la réserve, à 4400m d’altitude (plutôt haut pour un bus public, n’est-ce pas ?), le paysage est noyé sous une épaisse purée de pois.
Nous entamons tout de même notre ascension du Chimborazo, très lentement. À cette altitude, la plus haute de toutes nos randonnées, la pente douce paraît dix fois plus raide. Ce n’est pas que nos jambes aient du mal, elles sont à peine sollicitées. Ce sont les poumons qui tournent à plein régime, comme après un sprint. Emballés sous toutes nos couches pour lutter contre le vent glacial, nous nous prenons pour des astronautes explorant une autre planète…
Soudain, à travers les vapeurs inhospitalières, les habitantes de cette planète nous font face. Elles allongent leurs cous interminables et écarquillent leurs grands yeux incrédules…
Ce sont des vigognes ! Ces fragiles cousines du lama survivent aux altitudes extrêmes grâce à leur laine, la plus fine et la plus douce du monde. Nous sentons que nous les stressons et qu’un pas de plus vers elles leur ferait prendre leurs jambes à leurs cous. Or avec un cou pareil, le risque d’emmêlement est important. Nous les contournons et reprenons notre ascension.
Cela fait maintenant une heure que nous marchons à l’aveugle, hésitant de plus en plus sérieusement à rebrousser chemin. Rien ne sert de poursuivre si la météo persiste à nous gâcher la vue.
Et puis, tout à coup, une éclaircie. Le sommet du Chimborazo est là, devant nos yeux éberlués, tel un mirage élaboré par nos cerveaux harassés.
Sans échelle, nos repères sont chamboulés. Le volcan semble à la fois si proche et si lointain. Nous finissons par discerner en plissant les yeux le microscopique refuge des 5000m situé à la lisière des neiges éternelles. Il peut s’agir d’un objectif pour cette randonnée. De notre côté, par manque de forces, nous arrêtons notre route sur un promontoire, face à ce morceau de volcan si imposant qu’il n’entre pas entier sur une photo. Nous ne sommes « qu’à » 4750m d’altitude, d’après nos altimètres, et le sommet nous toise donc 1500m plus haut, d’après nos calculettes.
Trois ans plus tôt, l’agence de VTT nous avait emmenés en voiture jusqu’au refuge des 5000m. Il est accessible sans risques, à condition de rester humble envers le volcan bien sûr. Au-delà, les pentes sont réservées aux alpinistes chevronnés. Les douzaines de mémoriaux plantés près du refuge sont là pour rappeler que Papa Chimborazo ne plaisante pas.
Après un rapide pique-nique bourré de sucre et de sel, deux apports recommandés en haute altitude, nous amorçons la descente. Nous profitons des paysages de pampa lunaire, enfin libérés des nuages.
Nous repérons maintenant facilement les groupes de vigognes et nous en approchons en douceur. Au lieu de s’enfuir, l’une de ces peluches plus curieuse que les autres s’avance. Elle nous étudie du coin de l’œil, fait mine de partir, revient, semble hésiter à nous poser une question qui ne viendra jamais.
Nous redescendons par le premier bus qui passe, encore plus amoureux de la haute montagne, de l’Équateur, de l’Amérique du Sud !
Conseils pratiques sur Riobamba et le volcan Chimborazo
Dormir à Riobamba
Nous avons trouvé l’hôtel Casa 1881 (~48€ petit déjeuner compris)i parfait : douillet à souhait (ça fait plaisir au retour d’une excursion !) et à l’accueil très sympathique.
Restaurants
Si la France vous manque, vous devriez trouver facilement une crêperie. Sinon, voici deux adresses pas particulièrement équatoriennes mais qui pourraient vous plaire :
- Vintage House : Des tacos, arepas, crêpes (encore !), hamburgers, dont beaucoup d’options végétariennes. Ne vous arrêtez pas à l’étrange décoration de maison de poupées, les plats sont bons et frais.
- Frida : Impossible d’être déçu dans ce restaurant mexicain très savoureux.
Transport de Latacunga à Riobamba
Un changement à Ambato est recommandé, mais tout s’enchaîne très rapidement puisqu’il s’agit de la route principale du pays. Premier bus : 1h de trajet, prix 2,50$. Deuxième bus : durée 1h40, prix 1,50$ + 0,20$ de taxes de terminal.
Randonner sur le volcan Chimborazo sans guide
Un bus de la compagnie Patria part chaque heure à la demie du terminal nord de Riobamba et coûte 2,50$ pour 1h de trajet. Il est globalement recommandé de monter en matinée pour éviter les nuages, mais les gardiens n’ouvrent la barrière que vers 8h-8h15. Le bus de 7h30 est donc le plus approprié. Pour le retour, attendez au bord de la route et hélez un bus.
L’entrée dans le parc est gratuite, il faut simplement renseigner son nom et son numéro de passeport. Elle se trouve à 4350m d’altitude. Une fois entré, toute la difficulté est de repérer le chemin piéton/VTT, surtout sous la brume. Après le buisson, la route pour voitures part à droite. Au lieu de la suivre, continuez tout droit sur la petite butte. Les premières balises manquent, mais vous repérerez rapidement les suivantes.
Habillez-vous chaudement, comme si vous alliez skier, avec gants et bonnet. Vous retirerez éventuellement quelques couches au soleil. Étalez-vous impérativement de la crème solaire. Enfin, prévoyez des snacks pour alimenter votre corps. Les alpinistes du coin emportent des biscuits salés et des blocs de sucre de canne, carrément.
Attention, n’entreprenez cette aventure que si vous êtes déjà acclimaté à l’altitude depuis au moins sept jours, le temps que votre armée de globules rouges reçoive des renforts. Même après ce délai, il est normal d’être (très) essoufflé et d’avoir le cœur qui cogne dans la tête. Tout autre symptôme (vertige, nausée, migraine…) implique une redescente immédiate.
Descendre le Chimborazo à vélo
Même si elle n’est pas donnée (60$ par personne), nous recommandons les yeux fermés cette expérience à tous les amateurs de sensations fortes. Elle est proposée par l’agence Pro Bici, qui assure autant au niveau de la bonne ambiance que du sérieux. Vous serez déposés en voiture à 4800m, grimperez à pied jusqu’au refuge des 5000m, puis redescendrez tranquillement sur vos VTT à travers des paysages variés. Le tout prend six-sept heures.
4400m d’altitude ça commence à faire! Vous étiez acclimatés mais tout de même. Pour la respiration j’ai lu dans « La grande crevasse » de Frison-Roche qu’il fallait se forcer à respirer plus vite. Astuce.
Les paysages sont sublimes comme toujours même si pendant un moment j’ai cru que vous alliez connaitre de nouveau la malédiction des volcans guatémaltèques sous les nuages.
Ah merci pour l’astuce, on retient ! Nous aussi, on a bien cru que la malédiction revenait. Finalement, on est contents d’avoir eu un début de balade difficile, ça n’a rendu la suite que plus magique !
Cela devait vraiment être extraordinaire. Magnifiques photos avec la neige et les vigognes. Et trop rigolo le dessin sur la Bretagne !
Oui, une expérience forte ! On s’en souviendra longtemps.
Nous vous suivons de près alors merci pour toutes ces astuces et cette écriture vraiment sympa!
Une famille en vadrouille!
Ah génial ! Votre voyage a l’air superbe et les enfants doivent adorer. On est épatés de voir qu’ils ont escaladé le Fuya Fuya plus vite que nous !
Merci pour les compliments et ravis de savoir que quelques astuces peuvent vous servir. On croise les doigts pour qu’un grand soleil éclaire votre balade sur le Chimborazo 🙂
Nous avons fait un road trip moto au Pérou en Juin dernier jusqu’à 4 600m d’altitude et avons eu la chance de voir des troupeaux entiers de vigognes et aussi de lamas. Un vrai régal pour les yeux de pouvoir admirer d’assez près ces animaux dans leur habitat naturels.Merci pour ces superbes photos qui nous rappellent des scènes villageoises péruviennes et les paysages andins. Bravo pour votre rando, il faut le faire !
On imagine facilement le bonheur d’aller se perdre sur les routes à de telles altitudes. Vous nous faites rêver avec ce road trip en moto dans les Andes !
Encore de magnifiques paysages !! il va falloir passer le cap de l’alpinisme !! En tout cas, c’est vraiment beau !! Biz
Ça nous plairait sûrement ! Ça nous rappelle quand on admirait les poissons avec masques et tubas, la prochaine étape est la plongée avec bouteille… mais ça complique tout !
Hello !
Merci pour ces précieuses infos. On a tenté l’aventure nous aussi mais on a eu moins de chance. La pluie s’en est mêlée, puis lorsque le soleil a refait son apparition, notre bus s’est retrouvé coincé sur la route. Bref une loi des séries qui ne nous a même pas permis d’arriver au départ de la rando. À charge de revanche !
Bon voyage et bonne découverte de l’Argentine, un pays formidable. Si comme nous vous recherchez des infos sur les blogs de voyageurs, jetez un œil sur La Planète en Claquettes. C’est notre humble petit carnet de voyage 😉
Bonne continuation et à un de ces jours sur la route qui sait !
Salut à vous deux !
Zut, c’est pas de chance… Sympa votre blog, vous avez fait un sacré beau voyage autour du monde !
Salut à vous deux,
Super votre article ! Ça nous a donné envie de faire le Chimborazo à pieds !
Auriez-vous quelques infos utiles à nous transmettre ? Bus, direction… Merci beaucoup et bonne continuation. J’adore lire vos articles 🙂
Hello Fanny,
Tu retrouveras toutes ces informations en bas de l’article, dans l’encadré « infos pratiques ».
Profitez bien !
merci à tous les deux
voyage réservé en Equateur du 14 janvier au 3 février 2024 et vous allez bcp m’aider avec vos vidéos!!!!!!!!!!!!!!!!
je suis en train de faire mon plan de route
Pensez-vous qu’il faille hors Quito louer une voiture ou est-ce plus prudent de prendre les bus ?
Avez-vous pu concilier la sierra avec l amazonie?
Nos vidéos ? Tu dois confondre 🙂
La conduite équatorienne nous a semblé prudente, nous ne voyons donc pas trop de contre-indications à la location de voiture (faites juste faire votre permis international). Pour notre part, dans un pays où les bus sont aussi fiables et confortables, nous préférons les prendre pour ne pas nous tracasser avec un volant.
Lors de notre premier voyage équatorien, nous étions passés voir l’Amazonie. Cela se fait bien depuis Baños.
Bonjour. Merci pour les nombreuses informations contenues sur votre site. J’ai la ferme intention en février 2025 de tenter l’ascension du Chimborazo avec guide. En mars dernier, j’ai atteint le refuge à 5000 mètres à partir du refuge à 4800 mètres. Je suis en très bonne condition physique, ce à quoi, je me pose des questions est la rareté de l’air dans l’ascension. Pour réaliser mon objectif voici mon plan: Arriver à Riobamba 12 jours avant l’ascension du Chimborazo. Lors des 7 premiers jours partir à pied de l’entrée du Chimborazo jusqu’à 5000 mètres. Le 8ie jour faire l’ascension du volcan Carihuairazo avec guide pour me préparer pour le Chimborazo. Du 9ie au 11ie jours dormir au refuge à 5000 mètres pour habitué mes poumons à l’air en haute altitude. Est-ce que avec un tel plan, je peux atteindre mon but? Merci
Bonjour Guy,
Beau projet ! Désolés, on ne va pas pouvoir te renseigner. On n’a accompli aucun exploit sportif de notre côté, ce n’était qu’une petite balade pas si haute, alors on ne voudrait pas te donner de mauvais conseils. Essaie de trouver des habitués de ce genre d’ascensions pour voir ce qu’ils en disent.