Que ceux qui ont entendu parler de Santorin lèvent la main. Houlà, il y a du monde ! Et maintenant, qui connaît le Pélion en Grèce ? Un bras… deux bras… trois ? Ah non, la dame se gratte l’oreille. Eh bien tant mieux, nous allons pouvoir vous apprendre quelques trucs sur cette péninsule riche en découvertes et curieusement restée à l’écart du circuit touristique classique.
Commençons par une pointe de géographie. Le Pélion est une péninsule arrimée à la Grèce continentale, à mi-chemin entre Athènes et Thessalonique, qui mouille en mer Égée.
Il se trouve dans le département de la Magnésie, où les Grecs anciens ont observé interloqués certaines pierres attirer le fer, ce qui a donné le mot magnétisme. De notre côté, ce sont les paysages du Pélion qui nous ont aimantés. Ils sont hérissés de montagnes et nappés d’une couche de forêt impénétrable, si impénétrable qu’elle hébergeait autrefois le peuple des Centaures… et les abrite peut-être encore, si nous en croyons les crottins que nous avons repérés sur un chemin.
Ce qui est sûr, c’est que la magie continue d’infuser cette contrée, lorsqu’au pied des pentes touffues surgit une série de criques à l’eau fabuleusement turquoise.
Ce n’est pas tout, le Pélion cultive de fortes traditions et recèle une kyrielle de villages perchés qui se visitent avec tout le respect qu’inspire leur ancienneté.
Ne vous laissez pas leurrer par la petitesse du Pélion sur une carte, ses routes sinueuses multiplient les distances par quatre. Pour cette raison, nous y avons prévu sept jours, séparés en deux points de chute, d’abord à Agios Ioannis au nord-est, puis à Chorto au sud-est.
- Makrinítsa dans les nuages
- Agios Ioannis, station balnéaire pépère
- De Damouchari à Fakistra, randonnée de crique en crique
- Milopotamos et Limnionas, les plus belles plages ?
- Tsagkarada et son platane géant
- Milies, Vizitsa, Pinakates, série de villages perchés
- Afissos, Chorto et Milina en bord de mer
- Mikro et Platanias, les plages du sud
- Tríkeri, la pointe de la pointe du Pélion
- Notre avis sur le Pélion
- Nos découvertes dans le Pélion sur une carte
- Conseils pratiques pour visiter la péninsule du Pélion
Entrée en matière mystique à Makrinítsa
À l’entrée des montagnes du Pélion, ce sont des routes en cours de raccommodage qui nous accueillent. La région a reçu le déluge du siècle sur la tête en septembre et éponge encore ses plaies sept mois plus tard.
Nous décidons un rapide détour par Makrinítsa, un premier village qui nous donne l’impression… de vivre dans une humidité permanente depuis la nuit des temps.
Nous sommes néanmoins surpris par la beauté de ce village tout en pierre, par ses toits en lauze, ses vieilles maisons à encorbellement et les platanes démesurés qui le capuchonnent. Nous ignorons encore qu’il en existe d’aussi mastocs dans tous les autres villages du Pélion.
Se révèle aussi une magnifique vue sur… euh… la baie de Vólos, en théorie :
Agios Ioannis, station balnéaire pépère
Rassurez-vous, quelques montagnes plus loin, la météo se ravise et rend le soleil jusqu’à la fin de notre séjour pélionite. Notre premier logement se trouve à Agios Ioannis. Au terminus d’une descente pleine de virages, le village s’est installé sur la frontière entre la jungle envahissante et les vagues incessantes.
Un net contraste semble exister entre les villages perchés du Pélion, sanctuaires de traditions que nous imaginons manger de la soupe de fougères au coin du feu, et les villages plus récents du littoral qui accueillent l’essentiel des touristes et leur servent du poisson à toutes les sauces.
Pour les fouineurs, la promenade principale se prolonge après le port jusqu’à une crique secrète.
Le soir venu, nous passons de restaurant en restaurant à la recherche d’un bon repas végétarien, que nous finissons par trouver dans une taverne bien taverneuse. Deux compères cuisinent clope au bec, tandis que le serveur sort de son chapeau des plats qui ne sont pas à la carte.
C’est ainsi que nous faisons connaissance avec le briam, délicieuse ratatouille noyée dans l’huile d’olive !
Agios Ioannis est réputé être le centre névralgique de l’animation dans le nord-Pélion, mais cela ne se remarque pas vraiment au début du mois de mai. Au moins, nous serons tranquilles pour profiter des jolis coins de nature environnants !
De Damouchari à Fakistra, randonnée de crique en crique
Le village voisin de Damouchari consiste en quelques maisons sous les oliviers et deux criques.
Sur la première, n’hésitez surtout pas à prévoir un arrêt au café-restaurant Victoria pour le petit ou le grand déjeuner. La patronne nous raconte qu’une scène du film Mamma Mia fut tournée juste sous sa terrasse, et nous comprenons ce choix, le cadre est magique !
Puis nous sortons ce plan de notre poche, et c’est parti pour une marche de 6km aller-retour…
… interrompue après deux minutes par la seconde crique de Damouchari. Mince, cela fait un mois que nous voyageons autour de la Grèce, et nous continuons d’être subjugués par une simple eau turquoise entourée de rochers !
Cette fois c’est parti. Nous prenons de la hauteur sur un vieux sentier muletier (qu’il ne faut pas suivre jusqu’au sommet, ne ratez pas la bifurcation à gauche).
S’ensuit une belle collection d’oliviers, lauriers et broussailles de toutes feuilles.
Jusqu’à atteindre la fameuse plage sauvage de Fakistra :
La descente finale jusqu’au sable est un peu acrobatique, mais la récompense vaut clairement l’effort. L’eau encore glaciale du mois de mai revigore avec efficacité les muscles fatigués ! Évitez les week-ends et la haute saison, la plage est réputée rapidement bondée.
À Milopotamos et Limnionas, le festival continue
Le lendemain, rebelote, nous retournons marcher au bord de l’eau. Notre nouveau point de départ est la scotchante plage de Milopotamos. La compétition de turquoise est rude au nord du Pélion ! Et pour les aventuriers, un mini tunnel dans la falaise mène à une seconde plage.
La balade, moins intéressante que la veille, consiste à traverser une mini vallée, puis suivre une route bitumée entre les oliveraies sur deux kilomètres. Encore une fois, nous sommes seuls à marcher. Soit les Grecs ne sont pas fans de randonnée, soit ils préparent leurs retrouvailles familiales de Pâques.
L’arrivée sur Limnionas est temporairement défigurée par des travaux postdiluviens, que nous oublions instantanément sur la plage. L’eau est d’un turquoise à concurrencer les Bahamas. Voyez plutôt ! Là encore, réchauffés par la randonnée, nous osons nous jeter dans une Méditerranée saveur Manche.
Tsagkarada, le platane géant
Avant de rentrer à Agios Ioannis, nous passons tirer la révérence au plus vieux platane du Pélion, au cœur du village de Tsagkarada. Nous en avons vu des gros arbres, mais celui-ci joue dans la catégorie supérieure, avec les baobabs et les diplodocus.
Milies, Vizitsa, Pinakates, série de villages charmants
Poursuivons avec trois vieillards perchés qui s’enchaînent facilement. Le premier est Milies, qui signifie « pommiers ». Et comme la vie est bien faite, c’est ici que l’on croque les meilleures pommes de Grèce, ainsi que toutes les déclinaisons possibles. Seul pépin, les rues ne sont pas piétonnes.
Milies est aussi connu pour son train à vapeur qui redescend de la montagne à travers la forêt et les vues panoramiques. Les rails n’ont pas apprécié les trombes d’eau, mais ils ont pu reprendre du service quelques mois après notre visite (voir infos). Actifs ou non, ils font également office de sentier de randonnée.
La balade sous les grands arbres est superbe et bien plate pour les allergiques au dénivelé. Quant au risque de se faire aplatir par le train, rassurez-vous, il est suffisamment lent, étroit et braillard pour éviter tout accident. Vous pouvez faire demi-tour quand vous le souhaitez, ou dérailler vers un chemin de traverse pour redonner une raison d’être à vos crampons de chaussures.
Notre étape suivante s’appelle Vizitsa, peuplée de vieilles pierres et de maisons traditionnelles parmi les plus impressionnantes du Pélion. Il était coutume de fortifier solidement le rez-de-chaussée comme pour dire « ne pas passer », puis de peindre élégamment le dernier étage pour « ne pas passer pour des rustres ».
La place principale possède évidemment ses platanes monumentaux, dont les graines poussent en forme de tables et de chaises.
Nous terminons notre tournée par Pinakates, village le plus typique de la triplette. Une partie des maisons menace de s’effondrer, ou ont déjà mis la menace à exécution, beaucoup d’autres sont joliment rénovées.
Pour conclure la journée, nous pouvons vous recommander ici l’excellent restaurant Pileas Pinakates. La patronne est très sympathique, ses recettes grecques ont une légère pointe d’originalité et elle offre des cadeaux en pagaille.
En grec, on dit que c’est la philoxenia, c’est-à-dire « amour de l’étranger ». Un mot qui mériterait davantage sa place que « xénophobie », dans notre langue française.
Afissos, Chorto et Milina : villages en bord de mer
Après ces quelques jours dans la partie nord de la péninsule, nous déménageons vers le sud du Pélion, où les montagnes se transforment en collines et les gens vivent plus proches de l’eau.
En chemin, nous marquons une pause à Afissos, décrit par le Routard comme l’un des plus beaux villages du Pélion. Il doit être plus intéressant d’y loger que de visiter en coup de vent, car nous passons à côté de son charme.
C’est à Chorto que nous posons nos balluchons. Le tour en est encore plus vite fait, mais comme il s’agit de notre nouveau chez nous, nous tournons davantage. Trois ou quatre restaurants, des hôtels, des collines boisées, quelques morceaux de plages et c’est à peu près tout. Le point fort du village était une jolie passerelle suspendue au-dessus d’une poignée de barques, mais elle a perdu l’équilibre lors de la tempête et les barques se sont enfuies.
Milina, le village suivant, est bien plus animé. En la presque absence de touristes étrangers, nous faisons connaissance avec le tourisme grec, qui consiste à passer la moitié de la journée à la terrasse d’une taverne, avec famille ou amis, et l’autre moitié à celle d’un café. Et plus Pâques (orthodoxe) approche, plus les tables s’allongent. L’ouzo est sur toutes les lèvres et la bonne humeur coule à flots.
À Lafkos, le miracle de Pâques
Lafkos est l’un des rares villages perchés du sud du Pélion et c’est par un dimanche un peu spécial que nous le visitons.
Dans la culture grecque, Pâques est plus importante que Noël, et l’occasion de grandes retrouvailles familiales. Les Athéniens reviennent en nombre sur la terre de leurs ancêtres et des agneaux innocents grillent devant chacun des restaurants de la large place centrale.
Même en traversant les ruelles pittoresques, nous entendons des rires grimper depuis chaque jardin fleuri. Notre hôte, en nous offrant des œufs durs teintés de rouge le matin, nous a expliqué que le véritable miracle de Pâques était… la quantité de nourriture avalée en une journée !
De notre côté, rejetés par les restaurants archi réservés, nous déjeunons… des œufs teintés de rouge.
Mikro et Platanias, les plages du sud
L’appel de la mer est trop fort, nous replongeons vers deux plages qui se touchent presque. La première, Mikro, aligne entre les lauriers roses quelques maisons, hôtels et restaurants et possède du sable fin, cela change des galets. Nous sommes quasiment seuls. Seuls humains de la péninsule à ne pas être bloqués à table pour les trente prochaines heures.
Pour atteindre la plage suivante de Platanias, il y a deux solutions : quinze minutes à pied ou trente en voiture, puisque la route fait un immense détour sur les collines. La décision est vite prise et la promenade est plaisante.
Le village de Platanias s’avère extrêmement calme (sauf le tintamarre des assiettes dans les restaurants, bien entendu). Et de platanes, nous n’en croisons guère. Avec une eau plus chaude, nous serions restés barboter, mais notre bravoure fait grève.
Nous pourrions croire, au vu de l’engourdissement ambiant, que nous sommes arrivés au bout de la péninsule, mais il y a plus isolé encore !
Tríkeri, la pointe de la pointe du Pélion
Pour notre dernier jour, nous visons la presqu’île de Tríkeri, point final du Pélion. Sur l’unique route qui y mène, les habitations se font plus rares et les paysages plus verts, décorés d’un chapelet de criques craquantes.
Nous commençons par une pause au village de Kottes, minuscule port de pêche où il y a peu à voir ou à faire, sinon s’installer sur un banc et regarder les poissons nager à travers l’eau limpide.
Le port suivant est nettement plus vivant et plus étendu que nous ne l’imaginions : Agia Kyriaki.
En ce lundi de Pâques, le marathon gastronomique bat toujours son plein et la convivialité inonde les tavernes. Avec tout ce que les Grecs engloutissent et tous les bateaux de pêche, nous nous étonnons qu’il reste des poissons en mer !
Visez l’une ou l’autre extrémité du village, mais n’espérez pas le traverser en voiture, il est trop étroit. Ce qui ajoute au charme des maisons fleuries et des petits bancs à l’ombre des lauriers.
Nous terminons notre visite par Tríkeri, perché au sommet de sa presqu’île. Il nous plaît bien, avec ses jolies placettes, ses terrasses ombragées et ses ruelles fleuries. Et puis, nous avons de la chance, c’est la fête au village ! Les mamies, les papis, les enfants, les musiciens, m’sieur l’pope, tous les sourires sont de sortie.
C’est ainsi que notre séjour dans le Pélion touche à sa fin. Avant de vous laisser retourner vaquer à vos occupations, voici le coucher de soleil qui nous raccompagne à Chorto.
Notre avis sur le Pélion
En plus de nous avoir offert une concentration de paysages mémorables, le Pélion nous a fascinés par sa personnalité. La péninsule semble avoir mis de côté le monde moderne pour perpétuer ses traditions à l’ombre des vieux arbres. L’été amène semble-t-il un paquet de touristes dans ses valises, mais en basse saison, nous nous sommes vraiment sentis plongés dans la Grèce profonde.
Nos découvertes dans le Pélion sur une carte
Conseils pratiques pour visiter la péninsule du Pélion
Où dormir dans le Pélion
Si vous envisagez un séjour découverte et exploration d’une petite semaine comme nous, ou plus, nous vous conseillons de le séparer en deux pour économiser quelques heures de route. La plupart des villages abritent quelques hôtels et restaurants, alors il n’y a pas de mauvais choix. Visez simplement des villages plus épais si vous aimez l’animation ou plus menus si vous préférez la tranquillité. Notez que les villages d’altitude ont un bonus fraîcheur en été, en contrepartie d’un malus humidité/brume le reste de l’année.
Nous étions ravis de nos deux choix de villages :
- Agios Ioannis au nord-est, de taille moyenne : Nous nous sommes installés chez Mariai, dans une petite chambre proche de l’eau. L’adresse est vieillotte et mériterait une bonne rénovation. Pour compenser, l’accueil est bienveillant, avec plein de petits cadeaux (la fameuse philoxenia !) dont une part de gâteau chaque matin.
- Chorto au sud-ouest, plus petit : Notre hôtel Athina Studiosi nous a beaucoup plu. Chaque chambre dispose d’une cuisinette et d’un balcon ou d’une terrasse où prendre les repas. Seul bémol, les matelas moyennement confortables.
Nous avions hésité à passer la première partie de notre séjour à Volos, la grande ville à l’entrée de la péninsule, car les logements y sont moins chers. Mais après une courte visite, nous déconseillons cette option. Sa modernité et son agitation vous éjecteraient chaque soir de l’ambiance du Pélion.
Où manger
Les restaurants ne manquent pas dans le Pélion, cependant beaucoup proposent plus ou moins la même chose, ce qui peut devenir lassant. Voici une sélection d’adresses qui ont un petit truc en plus, classées du nord au sud :
- à Agios Ioannis, Galeos est une taverne familiale, conviviale et sans chichi, comme beaucoup d’autres. Demandez s’ils ont cuisiné du briam, vous ne devriez pas être déçus.
- à Damouchari, Victoria’s propose des snacks sucrés ou salés avec vue sur la crique de rêve de Mamma Mia. Idéal aussi pour le petit déjeuner !
- à Pinakates, Pileas concocte des recettes grecques plus originales qu’ailleurs, servies face à un panorama spectaculaire.
- à Chorto, si la France vous manque, une dame très gentille prépare des crêpes dans un bel endroit appelé Casablanca.
- à Milina, nous avons beaucoup apprécié Argo, avec un bel accueil, plusieurs options végé et encore des cadeaux.
Se déplacer
Les transports en commun sont le point faible du Pélion, à une exception près : le petit train à vapeur de Volos à Milies. Nous avons loué une voiture à Athènes, que nous avons rendue à Thessalonique afin de visiter le Pélion et le Mont Olympe en chemin. Vous pourriez avoir envie d’ajouter Delphes et les Météores au programme, de notre côté nous les avions déjà visités.
Attention, nous avons lu et relu que la péninsule du Pélion était pleine à craquer de voitures l’été, et que c’était vite le gros bazar pour circuler et se garer.
Quand venir dans le Pélion
Beaucoup d’établissements ferment l’hiver, pour rouvrir quelques jours avant la Pâques orthodoxe. Excepté quelques périodes maussades, le climat est généralement bon de mai à octobre. Pour la baignade, patientez peut-être jusqu’à juin, car début mai nous nous pelions (haha !). Même si les touristes étrangers semblent moins nombreux qu’ailleurs en Grèce, évitez les mois de juillet et août, sauf pour vous installer près d’une plage et ne plus en bouger.
Pour poursuivre
La péninsule semble se prolonger au sud-est avec l’archipel des Sporades. Nous avons hésité à passer voir Skopelos, réputée pour sa beauté, mais nous ne voulions pas courir partout. Dites-nous !